LES médecins s’attendaient pour le moins à une pneumonie et à des gelures. Elle n’eut rien. Pas de toux, pas de fièvre, pas la moindre rougeur sur la peau.
Quand elle reprit connaissance, on vit qu’elle avait encaissé le choc et surmonté toutes ses émotions. Il n’y avait plus sur son visage que l’expression pétrifiée d’une indifférence totale, pareille à celle du condamné à perpétuité, au moment où il entre dans la cellule dont il sait qu’il ne sortira jamais. Elle savait qu’on lui avait dit la vérité. Elle voulut pourtant avoir les preuves. Elle demanda à entendre le rapport de l’Expédition. Mais quand l’infirmière commença à le lire, elle fit un geste de la main pour l’écarter et dit :
— Simon...
Simon n’était pas dans la chambre.
Après sa brutale intervention qui avait failli se terminer si mal, il avait été jugé dangereux par les réanimateurs qui lui avaient interdit de s’occuper désormais d’Eléa.
— Simon... Simon... répétait celle-ci.
Elle le cherchait du regard partout dans la pièce. Depuis qu’elle avait ouvert les yeux, elle l’avait toujours vu auprès d’elle, elle était habituée à son visage, à sa voix, aux précautions de ses gestes Et c’était lui qui lui avait dit la vérité. Dans ce monde inconnu, au bout de ce voyage effrayant, il était un élément déjà un peu familier, un appui pour sa main sur le rivage.
— Simon...
— Je crois qu’il vaudrait mieux aller le chercher, dit Moïssov.
Il vint, et il commença à lire. Puis il rejeta le papier et raconta. Quand il en arriva à la découverte du couple en hibernation, elle leva une main pour qu’il se tût, et elle dit :
— Moi c’est Eléa, lui c’est Coban. Il est le plus grand savant de Gondawa. Il sait tout. Gondawa, c’est notre pays.
Elle se tut un instant, puis ajouta d’une voix très basse, que la Traductrice eut de la peine à entendre :
— J’aurais voulu mourir en Gondawa...